Sciences - Le médecin britannique selon qui le vaccin combiné rougeole, oreillons, rubéole pourrait provoquer l’autisme était à la solde d’avocats qui voulaient intenter un procès collectif.
Anne-Muriel Brouet
Le vaccin combiné rougeole, oreillons, rubéole (ROR) ne provoque pas l'autisme. Une association entre les deux est non seulement fondée sur des études grossièrement biaisées mais encore le résultat d'une stratégie visant à intenter une action en nom collectif (class action) contre les fabricants du vaccin, révèle l'enquête d'un journaliste du Sunday Times *.
Pire, un fonds d'aide juridique britannique, public, a versé plus de 8,5 millions de francs à des chercheurs et médecins pour accréditer cette thèse en vue de ce procès, aujourd'hui abandonné.
La bombe explose en février 1998. Le triple vaccin ROR provoquerait un nouveau type d'autisme, combinant troubles gastriques et syndrome régressif, selon une étude parue dans la revue médicale de référence britannique The Lancet. Dans une conférence de presse, donnée à l'époque, l'auteur de l'étude, Andrew Wakefield, plaide pour une vaccination séparée des trois maladies.
L'autisme étant une maladie aux causes mal connues, la communauté médicale aussi bien que les parents s'inquiètent. La vaccination ROR chute drastiquement en Grande-Bretagne tandis que la polémique s'étend à l'Europe et aux Etats-Unis.
Les études se multiplient dans le monde pour confirmer ou infirmer cette hypothèse. En 2002, le doute est levé: il n'y a aucun lien entre les deux choses.
Et pour cause, démontre l'enquête de Brian Deer. Derrière Andrew Wakefield, il y a un avocat, Richard Barr, à la recherche d'une class action.
Depuis 1996, il paie grassement Wakefield pour trouver la faille dans le ROR. Pourquoi lui? Le médecin londonien a déjà publié un article, dans The Lancet, sur un lien éventuel entre inflammation de l'estomac et infection virale persistante, due au vaccin contre la rougeole. Bien que cette thèse ait été infirmée, il poussera l'idée en soutenant que ces troubles digestifs modifient la perméabilité intestinale. Du coup, les toxines passent dans le sang et causent des lésions neuronales, provoquant l'autisme. C.Q.F.D.
L'objectif est plus large.
Wakefield, qui travaille à la Royal Free Medical School, a des projets qui pourraient rapporter gros: un vaccin unique contre la rougeole et des médicaments contre les problèmes gastriques et l'autisme.
Barr paye Wakefield au prix fort. Le médecin trouve parmi ses patients 12 enfants qui souffrent de troubles gastriques et d'autisme. Il nourrit ainsi son hypothèse et publie son article en 1998. D'autres, aux données biaisées, suivent.
Auditions en juillet
Parallèlement, les parents des «victimes» sont candidats à l'action collective menée par Barr. Ils seront rejoints par 1600 personnes. Durant 10 ans, la Commission des services légaux (LSC) arrose des chercheurs – beaucoup d'associés, partenaires commerciaux et employés de Wakefield – pour fournir des expertises, rapporte encore le journal britannique. Le médecin lui-même recevra un million de francs d'argent public.
Après avoir soutenu les travaux du Britannique durant six ans, The Lancet admet son erreur, en 2002. Aujourd'hui, le Conseil général médical de Grande-Bretagne a ouvert une enquête sur Andrew Wakefield qui se traduira par des auditions dès le mois de juillet. Quant à la LSC, qui gère un budget de plus de 3 milliards pour rendre la justice accessible aux défavorisés, elle a reconnu que son action contre le ROR était «ni efficace ni appropriée», rapporte le Sunday Times. Elle devra aussi vraisemblablement rendre des comptes.
* L'enquête complète de Brian Deer se trouve sur le site:
briandeer.com/mmr/lancet-summary.htm
Anne-Muriel Brouet
Le vaccin combiné rougeole, oreillons, rubéole (ROR) ne provoque pas l'autisme. Une association entre les deux est non seulement fondée sur des études grossièrement biaisées mais encore le résultat d'une stratégie visant à intenter une action en nom collectif (class action) contre les fabricants du vaccin, révèle l'enquête d'un journaliste du Sunday Times *.
Pire, un fonds d'aide juridique britannique, public, a versé plus de 8,5 millions de francs à des chercheurs et médecins pour accréditer cette thèse en vue de ce procès, aujourd'hui abandonné.
La bombe explose en février 1998. Le triple vaccin ROR provoquerait un nouveau type d'autisme, combinant troubles gastriques et syndrome régressif, selon une étude parue dans la revue médicale de référence britannique The Lancet. Dans une conférence de presse, donnée à l'époque, l'auteur de l'étude, Andrew Wakefield, plaide pour une vaccination séparée des trois maladies.
L'autisme étant une maladie aux causes mal connues, la communauté médicale aussi bien que les parents s'inquiètent. La vaccination ROR chute drastiquement en Grande-Bretagne tandis que la polémique s'étend à l'Europe et aux Etats-Unis.
Les études se multiplient dans le monde pour confirmer ou infirmer cette hypothèse. En 2002, le doute est levé: il n'y a aucun lien entre les deux choses.
Et pour cause, démontre l'enquête de Brian Deer. Derrière Andrew Wakefield, il y a un avocat, Richard Barr, à la recherche d'une class action.
Depuis 1996, il paie grassement Wakefield pour trouver la faille dans le ROR. Pourquoi lui? Le médecin londonien a déjà publié un article, dans The Lancet, sur un lien éventuel entre inflammation de l'estomac et infection virale persistante, due au vaccin contre la rougeole. Bien que cette thèse ait été infirmée, il poussera l'idée en soutenant que ces troubles digestifs modifient la perméabilité intestinale. Du coup, les toxines passent dans le sang et causent des lésions neuronales, provoquant l'autisme. C.Q.F.D.
L'objectif est plus large.
Wakefield, qui travaille à la Royal Free Medical School, a des projets qui pourraient rapporter gros: un vaccin unique contre la rougeole et des médicaments contre les problèmes gastriques et l'autisme.
Barr paye Wakefield au prix fort. Le médecin trouve parmi ses patients 12 enfants qui souffrent de troubles gastriques et d'autisme. Il nourrit ainsi son hypothèse et publie son article en 1998. D'autres, aux données biaisées, suivent.
Auditions en juillet
Parallèlement, les parents des «victimes» sont candidats à l'action collective menée par Barr. Ils seront rejoints par 1600 personnes. Durant 10 ans, la Commission des services légaux (LSC) arrose des chercheurs – beaucoup d'associés, partenaires commerciaux et employés de Wakefield – pour fournir des expertises, rapporte encore le journal britannique. Le médecin lui-même recevra un million de francs d'argent public.
Après avoir soutenu les travaux du Britannique durant six ans, The Lancet admet son erreur, en 2002. Aujourd'hui, le Conseil général médical de Grande-Bretagne a ouvert une enquête sur Andrew Wakefield qui se traduira par des auditions dès le mois de juillet. Quant à la LSC, qui gère un budget de plus de 3 milliards pour rendre la justice accessible aux défavorisés, elle a reconnu que son action contre le ROR était «ni efficace ni appropriée», rapporte le Sunday Times. Elle devra aussi vraisemblablement rendre des comptes.
* L'enquête complète de Brian Deer se trouve sur le site:
briandeer.com/mmr/lancet-summary.htm