20 février 2007

Autisme: de nouveaux marqueurs génétiques identifiés lors d'une vaste étude

Par Louise DALY

CHICAGO (AFP) - Une équipe internationale de chercheurs a identifié de nouveaux marqueurs ADN pour l'autisme dans le cadre d'une des plus ambitieuses études portant sur les origines génétiques de ce trouble envahissant du développement de l'enfant.
Ces nouvelles données apportent une preuve supplémentaire du rôle, dans l'autisme, de gènes liés au système de neurotransmission via un messager chimique, le glutamate, dans le cerveau.

L'étude, que vient de publier en ligne la revue scientifique Nature Genetics, suggère aussi qu'une région du chromosome 11, jusqu'alors non répertoriée comme telle, pourrait renfermer certains des gènes impliqués dans ce trouble mal compris.

"Ces résultats sont l'une des pièces du puzzle. En identifiant ces gènes, nous pourrons détecter l'autisme chez des enfants dès le plus jeune âge et commencer plus tôt à les prendre en charge", explique une des chercheuses, Geraldine Dawson (Université de Washington), soulignant l'impact que cela pourrait avoir sur leur développement.

Les résultats s'appuient sur l'analyse de l'ADN de 1.200 familles ayant au moins deux enfants autistes, ce qui en fait la plus vaste étude génétique sur l'autisme jamais entreprise, selon les chercheurs.

Ils ont utilisé des puces à ADN pour détecter des similitudes génétiques parmi les familles de malades. Ils ont aussi recherché au sein de l'ADN des anomalies submicroscopiques.

L'étude montre en particulier le rôle des gènes codant pour des neurexines, des protéines intervenant dans la mise en place des synapses, les connexions permettant aux cellules du cerveau de communiquer entre elles.

Le glutamate accroît l'activité des neurones et joue un rôle important dans le cablage du cerveau au tout début du développement.

Si le programme génétique pour le système de neurotransmission au glutamate s'avère défectueux, cela pourrait expliquer les erreurs de cablage qui, selon certains chercheurs, seraient à l'origine de ce trouble du développement.

Ces travaux s'appuient sur des recherches antérieures qui avaient permis de trouver que plusieurs gènes-clés associés au système glutamatergique se trouvent des régions chromosomiques associées à l'autisme.

Décidés à approfondir ces résultats, les chercheurs prévoient aussi, dans une seconde phase de l'étude, d'isoler les gènes de la région du chromosome 11 qui pourraient jouer un rôle dans le développement du syndrome autistique.

"Nous trouverons dans les quatre ou cinq ans une poignée de gènes prédisposant à ce trouble", prédit un des chercheurs, le psychiatre Joachim Hallmayer (Stanford University).

Etant donné la complexité de ce trouble et la probabilité qu'il existe sous une grande diversité de formes chez les enfants atteints, il faudra probablement, met-il en garde, attendre "des années et des années" avant d'aboutir à une percée thérapeutique.

L'autisme, qui apparaît avant l'âge de quatre ans, plus souvent chez des garçons, n'est pas un trouble unique, mais recouvre un éventail de troubles envahissants du développement. Il est caractérisé par des déficits de communication et des relations sociales, associés à des comportements répétitifs. Certains enfants autistes n'apprennent jamais à parler.

Les causes restent inconnues, cependant il y a un consensus scientifique impliquant une origine partiellement génétique. Des dizaines de gènes pourraient être impliqués.

L'étude, à laquelle ont participé 120 scientifiques de 19 pays, a été effectuée dans le cadre du consortium Autism Genome Project, associant 50 centres de recherches publics et privés décidés à joindre leurs efforts pour accélérer l'identification de gènes de susceptibilité à l'autisme.

19 février 2007

Largest-ever search for autism genes reveals new clues

The largest search for autism genes to date, funded in part by the National Institutes of Health (NIH), has implicated components of the brain's glutamate chemical messenger system and a previously overlooked site on chromosome 11. Based on 1,168 families with at least two affected members, the genome scan adds to evidence that tiny, rare variations in genes may heighten risk for autism spectrum disorders (ASD)*.

The study is the first to emerge from the Autism Genome Project (AGP) Consortium, a public-private collaboration involving more than 120 scientists and 50 institutions in l9 countries. Their report is published online in the February 18, 2007 issue of Nature Genetics.

With NIH support, the AGP is pursuing studies to identify specific genes and gene variants that contribute to vulnerability to autism. These include explorations of interactions of genes with other genes and with environmental factors, and laboratory research aimed at understanding how candidate susceptibility genes might work in the brain to produce the disorders.

"This is the most ambitious effort yet to find the locations of genes that may confer vulnerability to autism," said NIH Director Elias A. Zerhouni, M.D. "The AGP is revealing clues that will likely influence the direction of autism research for years to come."

"Although we know autism is highly heritable, complex gene interactions and submicroscopic anomalies create a din of statistical noise that drowns out detection of signals from linked sites in the genome," explained Dr. Bernie Devlin, University of Pittsburgh, who served as a corresponding author on the project along with the University of Toronto's Dr. Stephen Scherer. "To amplify these signals, we brought to bear gene chip technology with a huge sample, and also screened for these fine-level anomalies, factoring them into the analysis."

Clues emerged adding to evidence that implicates components of the brain's glutamate neurotransmitter system in autism. Glutamate increases neuronal activity and plays an important role in wiring up the brain during early development. Since autism likely stems from faulty wiring, a genetic blueprint gone awry in this pivotal neurotransmitter system is a prime suspect. Some key genes associated with the glutamate system are located in chromosome regions previously associated with autism, note the researchers.

Previous studies have also linked abnormal glutamate functioning to disorders such as Fragile X syndrome and tuberous sclerosis, which share some symptoms with autism. It's not unusual for individuals with either syndrome to be diagnosed with autism.

Among the new clues is stronger evidence for an association between autism and sites of genes for neurexins, molecules that build glutamate synapses – the connection machinery by which brain cells communicate.

A site on chromosome 11 most strongly linked to autism in this study harbors genes for proteins that shuttle glutamate across the synapse. Although detected previously, the linkage signal at this site was regarded as less important until now.

Submicroscopic anomalies – tiny deletions, or the doubling, tripling or even multiplying of stretches of genetic material – are relatively common in the human genome and aren't necessarily harmful. However, recent evidence suggests that these anomalies may contribute to risk for – or rarely even cause – autism if they affect certain sites associated with the disorder. The AGP researchers found a number of these variations in such suspect chromosomal locations in affected individuals, including deletion of a neurexin gene.

These anomalies can also make it more difficult to detect the genes that more commonly account for autism risk, say the researchers. Since each major autism candidate gene likely contributes to risk for a relatively small percentage of families, its linkage signal can easily be lost in the statistical noise generated by those of the anomalies – just as a high level of static can drown out a weak radio signal.

To amplify the power of possible linkages detected, the researchers analyzed many subsets of data, variously excluding from the sample factors like the submicroscopic anomalies, female sex, and ethnicity. These analyses unmasked several suggestive linkages that would otherwise have eluded detection.

Researchers last Fall reported (http://www.nimh.nih.gov/press/autismmetgene.cfm ) discovery of a gene version linked to autism and how it likely works at the molecular level to increase risk. The AGP researchers propose that multiple such gene variants, perhaps interacting with each other and with the tiny anomalies, contribute to risk. As more such genes are identified, studies of how they work in the brain – in mice and other model systems – will help to sort out the genetic and proposed environmental influences on autism spectrum disorders, say researchers.

A second phase of AGP studies will follow up on leads suggested in this first phase.

From U.S. NIH

10 février 2007

Réversibilité des symptômes d’un désordre du spectre autistique

Le syndrome de Rett a été inversé dans son modèle génétique chez la souris.

Traduit de l'anglais par Danièle Langloys

La Fondation pour la recherche sur le Syndrome de Rett (RSRF) annonce les résultats d’une recherche-clé qui a permis d’inverser les symptômes du Syndrome de Rett sur son modèle génétique chez la souris. Ces découvertes, faites par Adrian Bird, Professeur de l’Université d’Edimbourg et président du conseil scientifique de la RSRF, ont paru en ligne dans Science Express le 8 février 2007. Le syndrome de Rett est une maladie neurologique de l’enfance qui est la plus invalidante physiquement parmi les troubles du spectre autistique. Les expériences ont été financées par la RSRF, l’association Wellcome, et la Fondation britannique pour le Syndrome de Rett, des Jeans pour des Gènes.

Causé par des mutations sur le gène MECP2, le syndrome de Rett affecte essentiellement les filles ; il frappe au hasard dans la petite enfance et affecte le langage, la mobilité et l’usage fonctionnel de la main. Beaucoup d’enfants se retrouvent en fauteuil roulant ; ceux qui marchent manifestent une démarche anormale, avec une raideur des jambes. Des problèmes respiratoires et des tremblements de type parkinsonien sont courants.

La restauration de l’entière fonctionnalité du gène MEPC2 pendant 4 semaines a fait disparaître les tremblements et normalisé la respiration, la mobilité et la démarche chez des souris qui avaient auparavant tous les symptômes et dans certains cas étaient à quelques jours seulement de la mort.

« Comme beaucoup d’autres, nous pensions que donner le MEPC2 à des souris qui étaient déjà malades ne marcherait pas », a dit Bird. « L’idée qu’on puisse remettre un composant essentiel après la survenue des dommages cérébraux et récupérer une souris apparemment normale semblait tirée par les cheveux, car les cellules du cerveau qui s’étaient développées en l’absence d’un composant-clé étaient censées avoir été endommagées de manière irréversible. Les résultats sont agréablement nets, cependant, et doivent donner de l’espoir à ceux qui sont affectés par ce trouble douloureux. »

Bird est professeur de génétique à l’Université d’Edimbourg et directeur du Centre Wellcome de Biologie Cellulaire. Le MEPC2, identifié pour la première fois en 1990 par Bird, est considéré comme une protéine qui régule l’expression d’autres gènes en les arrêtant au bon moment.

En 1999, Huda Zoghbi, Professeur et Docteur en Médecine au Départements de Génétique Moléculaire et Humaine, Pédiatrie, Neurologie et Neuroscience du Collège de Médecine Baylor, a découvert que le syndrome de Rett était causé par des mutations sur le gène MEPC2. Des mutations sur le gène MEPC2 sont maintenant observées dans quelques cas de schizophrénie, d’autisme classique et de handicaps d’apprentissage.

« Ces découvertes sont extraordinaires et sont pertinentes non seulement pour le syndrome de Rett mais aussi pour une classe plus large de troubles, dont l’autisme et la schizophrénie. La restauration réussie du fonctionnement normal démontrée sur l’exemple des souris suggère que si nous pouvons développer des thérapies pour pallier la perte du MEPC2, nous serons peut-être capables de rendre réversibles les dommages neurologiques chez les enfants et adultes atteints du syndrome de Rett, d’autisme et de troubles neuropsychiatriques apparentés », a ajouté Zoghbi.

Les expériences de réversibilité ont été effectuées dans le laboratoire de Bird par son adjoint de recherche, Jacky Guy. Employant une technologie connue sous le nom de recombinaison Cre-lox 1, elle a créé des souris expérimentales dans lesquelles le MEPC2 a été inactivé par l’insertion d’une cassette stop 2 dans le gène, ce qui provoque les déficiences neurologiques observées dans le Syndrome de Rett. L’inactivation pouvait être rendue réversible à volonté en enlevant la cassette stop, ce qui alors réactivait le gène MEPC2. Ceci a été réalisé en administrant aux souris un médicament qui faisait entrer l’enzyme Cre dans le noyau de la cellule où il pouvait alors déloger la cassette.

En plus de perdre leurs déficiences comportementales manifestes, les souris recouvraient aussi une fonction électrophysiologique-clé. On l’a déterminé en mesurant la LTP 3 (potentialisation à long terme), qui fournit une mesure quantifiable de la capacité des neurones à répondre à une stimulation. On pense depuis longtemps que la LTP reflète la base cellulaire de l’apprentissage et de la mémoire. Bien que la LTP chez les souris de l’expérience fût déficitaire, elle fut restaurée dans ses fonctions normales par les expériences de réversibilité.

« La réversibilité des déficiences neurologiques, rapportée dans le remarquable article de Guy et autres, est surprenante, parce que la cause des symptômes est apparue tôt dans le développement et on s’attendait à ce qu’elle soit permanente. On remarque tout particulièrement la restauration de la LTP, qui est le meilleur équivalent physiologique actuel de l’apprentissage et de la mémoire. Ces découvertes sont très encourageantes pour ceux qui cherchent des traitements parce qu’elles donnent l’espoir que les symptômes pourraient non seulement être stoppés dans leur progression, mais que le cours de la maladie elle-même pourrait être inversé », a affirmé Fred Gage, Docteur en médecine à l’Institut Salk d’Etudes Biologiques.

« Les résultats étonnants du Docteur Bird font entrer le Syndrome de Rett et les autres troubles du spectre autistique dans une nouvelle ère. Les expériences de réversibilité justifient une exploration conquérante de nouvelles étapes sur tous les fronts, de la découverte de médicaments à la thérapie génique. La RSRF concentre ses efforts pour identifier et accélérer les traitements pour les enfants et adultes qui en ont terriblement besoin », a ajouté Monica Coenraads, co-fondatrice et Directrice de recherche à la RSRF, et mère d’une jeune fille atteinte du syndrome.

1-NdT : pour en savoir plus sur la Cre-Lox :
http://www.ipbs.fr/formation/biotech/knockout.pdf
2-NdT : on dit aussi en biologie "cassette de résistance".
3-NdT : en neurologie la LTP est une augmentation de la force chimique d’une synapse qui dure de quelques minutes à plusieurs jours.

Reversal of symptoms in an autism spectrum disorder

Rett Syndrome is reversed in genetic mouse model

The Rett Syndrome Research Foundation (RSRF) announces results of a landmark study reversing the symptoms of Rett Syndrome (RTT) in a genetic mouse model. The findings, by Adrian Bird, Ph.D., of the University of Edinburgh and Chairman of the RSRF Scientific Advisory Board, appear online in Science Express on February 8, 2007. Rett Syndrome is a severe childhood neurological disease that is the most physically disabling of the autism spectrum disorders. The experiments were funded by the Rett Syndrome Research Foundation (RSRF), the Wellcome Trust and the Rett Syndrome U.K./Jeans for Genes.

Caused by mutations in the gene MECP2, RTT affects primarily girls, striking at random in early childhood and destroying speech, normal movement and functional hand use. Many children become wheelchair bound; those who walk display an abnormal, stiff-legged gait. Disordered breathing patterns and Parkinson-like tremors are common.

Restoration of fully functional MECP2 over a four week period eradicated tremors and normalized breathing, mobility and gait in mice that had previously been fully symptomatic and, in some cases, only days away from death.

"Like many other people, we expected that giving MeCP2 to mice that were already sick would not work," said Bird. "The idea that you could put back an essential component after the damage to the brain is done and recover an apparently normal mouse seemed farfetched, as nerve cells that developed in the absence of a key component were assumed to be irrevocably damaged. The results are gratifyingly clear, though, and must give hope to those who are affected by this distressing disorder."

Bird is Buchanan Professor of Genetics at University of Edinburgh and Director of the Wellcome Trust Centre for Cell Biology. MeCP2, first identified by Bird in 1990, is considered to be a protein that regulates the expression of other genes by turning them off at the appropriate time.

In 1999 Huda Zoghbi, M.D., Professor, Departments of Molecular and Human Genetics, Pediatrics, Neurology, and Neuroscience at Baylor College of Medicine discovered that RTT is caused by mutations in the MECP2 gene. Mutations in MECP2 are now being seen in some cases of childhood schizophrenia, classic autism and learning disabilities.

"The findings are extraordinary, and are of relevance not only to Rett Syndrome but to a much broader class of disorders, including autism and schizophrenia. The successful restoration of normal function demonstrated in the mouse models suggests that if we can develop therapies to address the loss of MECP2 we may be able to reverse neurological damage in children and adults with Rett, autism and related neuropsychiatric disorders," commented Zoghbi.

The reversal experiments were carried out in the Bird lab by research assistant Jacky Guy. Employing technology known as Cre-lox recombination, she created mouse models in which MECP2 was silenced by insertion of a Stop cassette into the gene, resulting in the neurological deficits seen in RTT. Silencing could be reversed at will by removing the Stop cassette, thereby reactivating the MECP2 gene. This was achieved by treating the mice with a drug that caused the enzyme Cre to enter the cell nucleus where it could splice out the cassette.

As well as losing overt behavioral defects, the mice also recovered a key electrophysiological function of the brain. This was determined by measuring LTP (long-term potentiation) which provides a quantifiable measurement of the ability of neurons to respond to stimulation. LTP has long been thought to reflect the cellular basis of learning and memory. Though LTP in RTT mice models was defective, it was restored to normal function by the reversal experiments.

"The reversal of neurological defects, reported in the remarkable article by Guy et al, is surprising because the cause of the symptoms occurred early in development and was expected to be permanent. Of particular note is the recovery of LTP, which is the best current physiological correlate of learning and memory. These findings are very encouraging for those searching for a treatment because they give hope that the symptoms could not only be halted from progressing, but the course of the disease itself may be able to be reversed," stated Fred Gage, Ph.D. of the Salk Institute of Biological Studies.

"Dr. Bird's astonishing results usher in a new era for Rett Syndrome and other autism spectrum disorders. The reversal experiments provide justification for aggressive exploration of next steps on all fronts, from drug discovery to gene correction. The Rett Syndrome Research Foundation will be focused on a comprehensive effort to identify and speed treatments to the children and adults in dire need of them," commented Monica Coenraads, co-founder and Director of Research for RSRF and mother of a young daughter with the disorder.


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The reversal experiments were funded by the Wellcome Trust, the Rett Syndrome Research Foundation (RSRF) and the Rett Syndrome U.K./Jeans for Genes.

About the Rett Syndrome Research Foundation

The Rett Syndrome Research Foundation (www.rsrf.org) was created in late 1999 and is the largest private source of funds for biomedical research on Rett Syndrome.

About the Wellcome Trust

The Wellcome Trust is the largest charity in the UK and the second largest medical research charity in the world. It funds innovative biomedical research, in the UK and internationally, spending around £500 million each year to support the brightest scientists with the best ideas. The Wellcome Trust supports public debate about biomedical research and its impact on health and wellbeing. http://www.wellcome.ac.uk

01 février 2007

Des vaccins au parfum de scandale…

Par Destination Santé

En 1998, The Lancet publiait une étude incriminant le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) dans la survenue d'autisme et de rectocolites hémorragiques chez des petits Britanniques. Un scandale qui a défrayé la chronique. En fait tout cela n'était qu'une opération orchestrée, avec avocats marrons et chercheurs corrompus. Explications.

Depuis 25 ans, l'efficacité du vaccin ROR est établie par des dizaines d'études internationales. Diffusé dans le monde entier, il est administré sans problème à des dizaines de millions d'enfants. Mais en février 1998 donc, la publication par The Lancet de ce travail fait l'effet d'un coup de théâtre. Le vaccin provoquerait dans certains cas, un autisme ou une rectocolite hémorragique.

Le Dr Andrew Wakefield, du Royal Free Hospital dans le nord de Londres, sème le trouble. Comment un vaccin aussi répandu que le ROR aurait-il pu avoir un tel vice caché, qui échappe à tous pendant des années ? La réponse à cette équation « impossible » est aujourd'hui connue grâce à une investigation menée par Brian Deer, journaliste aux Dépêches britanniques et au Sunday Times de Londres : il s'agissait ni plus ni moins d'une manipulation de données par des chercheurs corrompus, le tout organisé en sous-main par un cabinet d'avocats pour soutenir une juteuse class action contre le fabricant du vaccin.

Plusieurs des enfants au coeur de l'étude Wakefield participaient en fait, parallèlement et de façon occulte, à une autre étude visant à établir les bases d'une action en justice contre le fabricant. Wakefield était rémunéré plus de 79 000 euros pour cette autre recherche. Peccadille pourtant : au total, le chercheur et son équipe ont empoché pas moins de 664 660 euros dans ce tour de passe-passe, le total des émoluments versés à des médecins dépassant 5 millions d'euros.

Encore cela ne représente-t-il que la partie émergée de l'iceberg, puisqu'au bout du compte cette affaire a coûté… plus de 24 millions d'euros en frais de recherches et de justice. Donc 12 millions pour le cabinet de l'avocat Richard Barr. Le tout réglé par les contribuables de Sa Majesté, la class action en question étant assumée au titre de la Legal Services Commission, en d'autres termes l'aide juridictionnelle.

Le bon Dr Wakefield s'est depuis installé à Austin, la capitale du Texas. Mais le scandale le rattrape et en juillet de cette année, il devrait répondre de ses agissements devant la justice britannique...

Entre-temps, The Lancet s'en est publiquement désolidarisé en publiant en mars 2004 un éditorial de rétractation… partielle. Un éditorial discret, qui n'a pas fait de bruit. Mais le mal, lui, était fait. Entre 1998 et 2003 et en dépit de démentis formels du gouvernement britannique, le nombre d'enfants vaccinés au Royaume-Uni a sensiblement diminué. La couverture vaccinale est ainsi passée de 92% à 78,9%, un chiffre très insuffisant pour empêcher la circulation des virus au sein de la population.

Résultat pour la première fois depuis 14 ans, un petit sujet de Sa Majesté est mort en mars 2006, victime de la rougeole... et de la rumeur persistante !

Les rumeurs peuvent tuer...

Cette dernière, qui renaît régulièrement chez nos voisins anglais, fait étrangement penser à la controverse franco-française sur le vaccin contre l'hépatite B. Un vaccin accusé d'avoir provoqué – et cela uniquement en France…- des poussées de sclérose en plaques. Et rien n'y fait. Même les récentes conclusions de la Commission nationale de pharmacovigilance n'éteignent pas cette rumeur.

Or elles sont formelles : « Depuis décembre 1994 jusqu'à septembre 2005, les (…)données de pharmacovigilance (...) n'ont pas permis de confirmer le rôle du vaccin (dans les poussées de sclérose en plaques) ». Onze études épidémiologiques ont déjà été réalisées, dont 5 à l'initiative de l'Agence française de Sécurité sanitaire des Produits de Santé (AFSSaPS). « Aucune n'a pu établir d'association significative entre la vaccination contre le VHB et la survenue d'affections démyélisantes, à l'exception d'une étude cas-témoins américaine ».

Il n'en reste pas moins que Bernard Kouchner, ministre de la santé, renoncera au maintien de l'obligation vaccinale contre l'hépatite B pour les enfants. Cette décision sera sévèrement critiquée par l'OMS qui mettra en garde ses Etats-membres contre la contagion du mauvais exemple français. En butte selon les termes de l'Organisation, à « des pressions énormes exercées par des associations hostiles à la vaccination », notre pays est le seul aujourd'hui dans le monde développé à ne pas protéger ses enfants contre un cancer évitable, celui du foie.

La communauté scientifique unanime assure que la France fait erreur. Des rapports circonstanciés – des autorités françaises comme de l'OMS – dénoncent là encore les biais de la seule étude qui, envers et contre toutes les autres, accable le vaccin. Et si, comme dans le cas du ROR au Royaume-Uni, ce n'était pas une erreur… ?

Source : The Sunday Times, 31 décembre 2006, MMR & autism investigation, AFSSaPS, 28 novembre 2006, OMS, novembre 2002, Legal Services Commission, 22 décembre 2006


Ce ne sont pas les rumeurs qui tuent, mais les irresponsables qui les propagent. Comme les malades des forums conspirationnistes, les adeptes de l'anti-vaccination (sémantiquement relookée sous le terme de "liberté vaccinale") et autres parents désemparés par le chagrin. Est-ce que tout ça valait 24 millions d'euros et un enfant mort ? Nous sommes du côté de ceux qui répondront "non".